Agenda : les Balades de Jacques, part I (inutile pour le livre en majorité)
J’ai rencontré Jacques quand j’étais à la colle avec Jeffrey Gibson, saxophoniste.
C’était vers 1978. Son frère Jim Gibson était avec une fille qui s’appelle Evelyne H.. Peut-être la sœur de Jean-Bernard H., peut être pas ? Je n’ai pas pensé à lui demander.
Notre groupe s’appelait “H. Special” et on jouait dans un pub rue Aristide Bruant dans le 18ème.
On habitait rue Germain Pilon. Donc dans la rue des Martyrs, on faisait la manche en attendant la fin du marché pour ramasser les fruits trop abîmés pour la vente du prochain marché.
Jacques passe avec une troupe de mendiants et nous invite à prendre un repas chez lui, avenue Trudaine. C’était un repas fraternel, chaleureux.
Un autre jour un type me demande si je me laisse enculer contre mille francs. Attention je te parle de mille francs de l’époque, c’était une somme. J’ai eu les mille francs mais j’étais super mal après ce coup. Vraiment très très nauséeuse, envie de gerber et tout.
Je suis allée chez Jacques, il m’a allongée sur une couchette blanche, il a allumé des bougies et fait brûler des cônes d’encens, et il était debout devant un beau pupitre en bois qui supportait une bible énorme comme celles qu’on voit dans les églises, enfin pas une bible de pédé, et il lisait des psaumes.
Mon vieux, c’était trop bien. Je t’en parle pour une autre raison.
A ce moment je croyais que Jacques racontait l’histoire d’un géant qui se promenait sur la terre.
Je voudrais bien retrouver ce psaume. Mais écoute la suite : un jour, je dormais chez Emmanuel qui écoutait non-stop la radio ici et maintenant sur 88.2. Et à la radio il y avait un type qui parlait et qui racontait la même histoire que celle de Jacques. Incroyable. Avec une voix qui transcendait l’aventure. C’était toi. C’est comme ça que c’est arrivé que je t’ai dans la peau maintenant.
C’est une association de ta voix et de ce psaume magnifique que Jacques a trouvé pour me calmer, et encore ta voix sur le fond des nuits que j’ai eu avec Emmanuel, et pas de la baise de pédé, enfin j’me comprends...
La nuit où tu as dédié ton émission à Florence Rey je faisais l’amour avec Emmanuel et on avait chacun un écouteur de sa walkradio. C’était fulgurant. Je ne peux plus te dissocier de moi. Il faudrait que je parte en vacances ou que je rencontre un autre homme, ou les deux. Aujourd’hui je suis allée chez l’ophtalmo avec Andréane. Je le connais depuis longtemps, Philippe avait des crises où ses yeux gonflaient et c’est lui que nous allions trouver pour la piqûre. J’aime sa façon de bouger. Je n’arrivais plus à parler, je me faisais un plan sexe avec lui : des gestes sûrs, puissants, précis, j’imaginai qu’il m’ouvrait et me forçait, sans rien dire. Il est massif, il a les yeux verts. Est-ce que c’est bon signe ? J’ai payé quarante euros.
Pour Andréane ce n’est pas grave (conjonctivite).
Voilà la démystification brutale d’une histoire qu’elle était quand même bien, non ? Pour mon papier de la semaine prochaine le sujet sera : la jalousie.
Lillian Gish