certificat de conformité obtenu le dimanche 13 juillet 2008

cash 12 Martinière

A Monsieur H. de la Martinière, Editions de la Martinière, Paris
Saint Cloud, le premier novembre 2002
Cher Monsieur Hervé de la Martinière,
Par l’intermédiaire de Philippe vous avez pu lire “Arc-en-ciel radio, le-manuscript-qui-laisse-perplexe”, que j’avais écrit au début de l’année 2002, et que j’ai fait circuler à la demande de mes parents et alliés, qui s’étaient émus de la spontanéité, de l’humour et de la liberté de ma plume atypique.
Cependant cet essai fait apparaître des propriétés alchimiques qui sans doute appellent un examen plus minutieux de la part d’une personne ou d’une équipe sollicitée de se prononcer quant à la viabilité commerciale du projet.
Et je vous remercie d’avoir passé quelque temps sur ce texte .
Un jour que j’écoutais la F.M. en traversant le Bois de Boulogne, seul maître à bord de ma vieille Peugeot 309 Chorus (année 1988) j’ai entendu un bonhomme ... qui racontait un peu (à la demande de l’interviewer) ses missions extrêmes (sport pratiqué : journalisme).
Voilà, c’est Jean-Claude Guillebaud, un homme de grand coeur qui aime les arbres et qui aime les bûcherons.
Il a un conte fétiche, un conte de l’Océanie, qui a un peu les couleurs de “Auprès de mon arbre”, la chanson de Brassens, mais en version nomade ...  
L’héroïne de l’histoire est une pirogue amoureuse du Patriarche Eucalyptus.
Par Laure Adler, directrice des programmes sur France-Culture, j’ai pu faire parvenir mon manuscrit jusqu’à Jean-Claude Guillebaud et sa réponse (dont je vous confie copie) d’une grande justesse, suggère un remaniement / réorganisation du projet.
 C’est vrai que ce truc que j’ai écrit ressemble plutôt à un tableau de Picasso où l’on voit un portrait de femme où visage face, trois-quarts face et profil se juxtaposent si curieusement que l’on est bien content de pouvoir lire en légende “visage de femme”.
Moi j’aime Paul Delvaux, ses personnages comme pris au ralenti, ses quais de gare au cordeau, sa géométrie fidèle et humble, ses lignes appliquées, ses couleurs patientes et assagies pas la force de la bonté et de la réflexion.
J’aime la peinture naïve, et mon livre est une peinture naïve mâtinée d’impressionnisme. Miscellaneous...
Or c’est plutôt, pauvre de moi, une bonne vieille traditionnelle “lettre ouverte à un fantôme” que pour l’heure j’ai sur le feu.
Qu’il remise son boulet et ses chaînes dans d’autres corridors que celui où j’ai déjà du mal à faire tenir mes enfants et tous leurs copains. Je ne veux pas passer mes nuits à déterrer un cadavre pour vérifier qu’il est bien mort.
Très brièvement, c’est assez bêtement de sous dont j’ai besoin tout de suite, et je fais auprès de vous, par la présente, la démarche spontanée de postulat à un emploi de balayeur du studio, plante verte, machine à café, correctrice de fautes d’orthographe/ syntaxe grammaticale, classe-papiers, saute-ruisseau (coursier), ou encore “happy-keyboard” (bonne à très bonne vitesse de frappe au clavier azertyuiop). Muse-à-tout-faire dans la mesure des compétences, donc hors téléphone et recevoir des gens.
J’ai le statut de travailleur handicapé protégé au taux de 80% reconnu par la commission technique d’orientation et de reclassement professionnel, et je vous demande audience pour parler avec vous d’une possibilité de contrat à durée déterminée, car je voudrais retourner aux Antilles auprès de ma fille dès que mes affaires seront remises en ordre, ou durée indéterminée, si vous ne pouvez déjà plus vous passer de moi .
Ma lettre me rappelle une planche de Gottlieb, Marcel : Rubrique-à-brac, Dingodossiers de Pilote Mâtin quel journal !, Fluide Glacial, Echo des Savanes...
C’est l’époque où il a été question de réintroduire des cigognes en Alsace, où l’espèce se faisait rare (je n’ai plus les détails : pollution ? ou bien : un nid obstruant une cheminée ? un incident qui avait dû lourdement discréditer le peuple échassier dans le coeur des Alsaciens, et les oiseaux vexés prenaient désormais d’autres itinéraires pour leur migration ...).
Et l’Alsace sans les cigognes, ce n’est pas bon pour le tourisme. Donc, le Maire passe une annonce, offre d’emploi.
Et, il y a une cigogne qui veut bien assurer la saison.
Tout le bourg, en costume d’alsaciens et d’alsaciennes, coiffes noires et tabliers blancs raides d’empoix, s’est rassemblé sur la place et attend d’un coeur unique, d’un nez unanime, les yeux rivés au ciel, la première turbulence d’air annonciatrice de l’arrivée majestueuse de la Cigogne, la salvatrice, la hiératique, l’emblématique, la patrimoniale Cigogne.
Et puis, voilà un taxi. C’est la Cigogne.
Elle descend de voiture. Elle a un sac en bandoulière d’où déborde son matériel à tricoter la layette.
Elle paye la course et dit dans un phylactère : « c’est pas dans mes habitudes, mais aujourd’hui j’ai pris un taxi, pour marquer le coup ».
Allez, c’est pas si mal raisonné : un petit boulot temporaire sympa de star régionale, ça ne se présente pas tous les jours. Faire bonne impression dès le premier instant, voilà qui est capital.
L’histoire ne dit pas si elle avait travaillé son accent alsacien pour faciliter son intégration à ce poste (car personne jamais n’a su vraiment d’où elle venait).
Je vais essayer de trouver la planche de Gottlieb pour vous.
Je vous remercie, cher Monsieur, et vous adresse mes salutations les meilleures.
Lakma de Kermal  
J'en suis pour mes frais de salutations à Monsieur de la Martinière. Et je n'ai pas non plus retrouvé la planche de la Star-Cigogne. Qu'est-ce que j'emmerde le monde avec mes émois de quinqua, il y a fort à faire dans la lutte contre le géant Hachette.
J'espérais me faire offrir un job dans la filiale in New-York. Changer d'air. Changer de langage. C'est vrai, le français c'est un peu toujours pareil à la longue. 
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